Dans le cadre de sa stratégie d’adaptation aux changements climatiques, la Ville de Laval avait lancé, en 2020, un projet de déminéralisation et de verdissement des terrains privés et institutionnels. L’objectif était de retirer plus de 3 000 mètres carrés de surface asphaltée, soit l’équivalent de 212 cases de stationnement, pour ensuite y planter des arbres. Et en bonne partie grâce aux efforts de la Société de verdissement du Montréal métropolitain (Soverdi), mandatée pour réaliser de projet, la Ville a pu relever le pari.
Scarlett Van Blaeren, directrice du Service de l’environnement et de l’écocitoyenneté, se dit particulièrement fière d’avoir atteint cet objectif de 3 000 mètres carrés de surface déminéralisée, en dépit de la pandémie.
Au départ, précise-t-elle, le plan visait surtout les commerçants et les entreprises qui possèdent de grandes surfaces de stationnement. Mais en raison des mesures de confinement, qui avaient entraîné la fermeture de la plupart des établissements, il n’était plus question de frapper à leur porte pour leur demander de participer à cet effort, même si la Ville assume jusqu’à 60 % des coûts. Nous avons donc dû nous tourner du côté des cours d’école, des établissements de santé et des sites municipaux pour atteindre notre objectif et planter 6 400 arbres de différents calibres.
Îlots de fraîcheur
Au total, en 2020, c’est plus de 34 000 arbres et 16 000 arbustes qui auront été plantés sur le territoire lavallois dans le cadre de différentes initiatives, dont certaines sont inédites. On peut citer à ce chapitre le projet de verdissement de quatre bretelles autoroutières avec la mise en terre de 23 000 plantules et 16 000 arbustes dans le but, notamment, de limiter la formation de smog et de créer des îlots de fraîcheur. Un projet réalisé en collaboration avec le Centre d’étude de la forêt de l’UQAM de manière à documenter les techniques d’aménagement et de plantation les plus efficaces pour assurer la survie et la croissance de ces végétaux soumis à des conditions difficiles.
Planter des arbres sur les terre-pleins de bretelles d’autoroutes pose de nombreux défis, explique Dany Gariépy, chef de division parcs et espaces verts. D’abord, ce sont des sols plutôt ingrats, difficiles à amender. Sans oublier que leur accès sécuritaire exige une logistique particulière. Mais ça vaut le coût d’essayer. Car les études le montrent. Une surface fauchée deux fois par année ne peut pas créer un îlot de fraîcheur aussi efficace que celui engendré par l’ombrage d’une canopée.
En testant différentes techniques de restauration écologique, le projet permettra de réaliser une analyse de leur coût-avantage, de mesurer l’effet de la végétalisation sur la réduction de la température de l’air et d’en modéliser l’impact sur la régulation de l’eau. « Bien sûr, ajoute Dany Gariépy, non seulement les données recueillies pourront servir à l’élaboration de futurs aménagements, mais nous souhaitons aussi qu’elles puissent servir à d’autres municipalités. »
Équité sociale
Laval compte plus de 3 000 hectares d’îlots de chaleur urbains (ICU), soit 12 % de son territoire. Aussi bien dire que les sites d’interventions ne manquent pas, bien que 82 % de ces ICU sont localisées sur des terrains n’appartenant pas à la Ville (62 % d’entre eux sont des terrains commerciaux et industriels). Cela dit, les efforts de verdissement ne se font pas au hasard. « Afin d’identifier les zones sensibles où il est prioritaire d’intervenir, explique Scarlett Van Blaeren, nous avons superposé la carte des îlots de chaleur sur celle qui mesure l’indice de défavorisation matérielle et sociale. Ce sont ces endroits, où les besoins se font le plus sentir, que nous ciblons afin de déminéraliser et de planter le plus rapidement possible. »
Cette approche qui place l’humain au cœur des priorités fait partie de l’ADN de la stratégie Urbaine de nature, renchérit Dany Gariépy. Notre Plan directeur des parcs et des espaces publics repose justement sur un découpage à échelle humaine. Nous avons créé 57 unités de sous-secteurs dont on peut extraire les données que l’on souhaite pour établir une liste de priorités en fonction des besoins. Par exemple, pour savoir quelle distance véritablement marchable sépare les résidents d’un parc. Ou encore vérifier si, en vertu de notre plan d’action, il est nécessaire d’augmenter la superficie d’un parc pour qu’il atteigne 10 mètres carrés par habitant.
La trame verte et bleu
En juillet 2020, la Ville de Laval déposait coup sur coup son Plan de foresterie urbaine, son Plan directeur des parcs et des espaces publics, évoqué plus haut, et son Plan de conservation et de mise en valeur des milieux naturels. Il s’agit des trois axes à partir desquels s’articule la Trame verte et bleu. D’ici 2035, l’ensemble de ces initiatives devraient permettre de protéger 14 % du territoire lavallois, de faire passer la superficie de la canopée de 23 % à 27 % et d’offrir ce fameux 10 mètres carrés de parc par habitant accessibles à moins de 15 minutes de marche.
Mais au-delà des nombres, la Trame verte et bleu représente une vision qui fédère l’ensemble des initiatives de la Ville en matière d’aménagement du territoire.
Elle repose sur une stratégie d’identification de milieux naturels d’intérêt, explique Scarlett Van Blaeren. Et, le cas échéant, d’en faire l’acquisition. Donc de protéger et de consolider des noyaux de biodiversité, ce qui implique évidemment de les relier entre eux par des corridors. Et bien entendu, Laval étant une île, ces noyaux de biodiversité incluent aussi des berges.
Bien sûr, tous les corridors de liaisons n’ont pas encore été complétés, mais à terme ils permettront notamment d’offrir aux Lavallois un vaste réseau de sentiers pédestres, en plus de 450 km de sentiers cyclistes. Cette Trame verte et bleu va donc enrichir un territoire déjà doté de 308 parcs et espaces publics, dont 48 berges publiques, 22 bois d’intérêt et 2 rivières. Et ainsi offrir à tous ses résidents la possibilité de profiter de la nature et de ses bienfaits.
Une histoire de cœur
Depuis quelques années, Laval a multiplié les gestes en faveur d’un développement durable en vertu de son adhésion au Programme Climat municipalités (PCM), du ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. La ville a même parfois pris les devants en se dotant par exemple d’un Règlement de contrôle intérimaire sur les milieux humides avant même de déposer son Plan régional des milieux humides et hydriques, tel qu’exigé par le ministère de l’Environnement d’ici juin 2022.
Parmi les différentes initiatives destinées à créer des milieux de vie à échelle humaine, on peut citer son programme des mesures d’apaisement de la circulation, sa Politique du stationnement axée sur la mobilité durable et la création d’un Bureau de la mobilité durable. À ce chapitre, dans le but d’aménager des rues plus vertes, plus piétonnes et plus cyclables, la Ville a établi 11 nouveaux gabarits de rue qui vont servir de guides pour les promoteurs, les entrepreneurs et l’administration lavalloise. Des gabarits de rue qui font d’ailleurs la part belle à la plantation d’arbres.
Toutes ces initiatives découlent bien sûr de la Vision stratégique – Laval 2035 : Urbaine de nature, et qui se décline en vertu de cinq facettes dotées de leurs propos logos :
- vivante de nature, représentée par une feuille
- séduisante de nature, représentée par un œil
- humaine de nature, représentée par un cœur
- entreprenante de nature, représentée par une roue
- engagée de nature, représentée par une main
Ces cinq éléments ont d’ailleurs donné l’idée à Dany Gariépy de les incarner sous forme de mosaïcultures. Sa proposition ayant été retenue, on a d’abord voulu la tester en créant une première mosaïculture en forme de cœur. Elle devait être installée sur le site désigné pour recevoir les Jeux du Québec. «Malheureusement, nous n’avons pas obtenu les jeux, raconte Dany Gariépy. Puis, il y a eu la pandémie. Alors on s’est dit que le meilleur endroit pour installer notre mosaïculture, c’est sur le terrain l’Hôpital Cité de la santé. Ç’a été une belle surprise pour les employés. Tout le monde était ravi. Ça leur a fait chaud au cœur. Et c’est ça être urbain de nature !»